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Il ouvrit les yeux. Reprenant peu à peu conscience, Amnael se redressa, puis s'assit en regardant calmement autour de lui. Il était seul sur un promontoire rocheux, face à une petite côte sablonneuse, bordée de falaises sur lesquelles nichaient quelques mouettes. Au loin il pouvait voir les étendues vertes d'une plaines boisée où l'aurore déposait les premières gouttes de rosée. Il prit le temps de quelques bouffées d'air marin avant de se relever. Il était simplement vêtu, de sa tunique courte, son pantalon de cuir souple et de ses bottes de voyage. Derrière lui se dressait un petit monument en pierre, une sorte d’obélisque taillé dans le roc, haute comme deux hommes. Son espadon gisait non loin sur le sol. Il le laissa tel quel, se préparant à le faire apparaître à sa main si le besoin s'en faisait sentir.
Bien qu'il ne sache où est-ce qu'il était, il n'était pas anxieux. Le rocher sur lequel il était assis se situait à plusieurs mètres du rivage, et encerclé par l'eau salée cinglant la roche. De plus, il avait beau solliciter ses pouvoirs, il ne ressentait aucune présence à plusieurs lieues à la ronde. Prenant un peu d'élan, il sauta du rebord et, aidé de sa télékinésie, il atteint de justesse la terre ferme, reprenant son équilibre au bord d'une digue rocheuse naturelle, qui lui offrait de belles prises pour ne pas finir à la mer. Escaladant facilement les quelques pierres qui le séparait du bras de terres longeant la côte, il prit conscience que quelque chose n'allait pas.
Sondant plus profondément les environs, le demi-elfe s'assit en tailleur et fit des exercices de respirations, entrant en état de méditation. Il comprit alors que l'air était saturé de magie, ce qui rendait l'utilisation de ses pouvoirs d'autant plus facile. Mais il y avait autre chose, un changement en lui qu'il ne comprenait pas.
**J'ai vieilli ?** Se relevant brusquement, il partit en direction de la petite plage, et une fois au bord de l'eau, se pencha pour observer son reflet. Il était difficile d'y voir distinctement à cause de l'écume et de la marée, mais ce qu'il discerna le déconcerta. Son visage, normalement glabre, affichait maintenant une barbe de quelques jours, aux poils épars, et passant sa main sur son nez et son front, il sentit deux entailles rugueuses et cicatrisées qui n'était pas là avant.
Il se mit alors en quête d'autres changement sur son anatomie, trouvant une blessure cicatrisée au genoux droit, probablement le fait d'une lance, ainsi qu'une entaille démesurée au niveau de l'abdomen.
**Celle-ci aurait dû me tuer...** Un souvenir lui revint alors en mémoire. Il se vit, en armure, usé par les combats, au coté de son ami Tharivor. Celui-ci, échevelé et le visage maculé de sang, nettoyait la lame de son épée à l'aide d'un morceau de tissu déjà imbibé. Non loin on entendait le fracas des lames et les cris d'une bataille déjà presque achevée. L'air était lourd et chargé de relent macabres. Ils étaient assis un l'intérieur d'une petite cour de pierre taillée, un passage à leur droite menant au gros du combat. plusieurs soldats passèrent en courant près d'eux, chargés de madriers afin de renforcer les portes et ralentir la progression de l'ennemi.
A bout, Amnael laissa échappe un soupir.
- Je ne croyais pas que ça finirait de cette manière... dit-il dépité, les yeux rivés au sol couvert de sang et de poussières.
Son ami sourit calmement, continuant calmement à essuyer son visage.
- Finir ? Non, le voyage ne s'achève pas ici, la mort n'est qu'un autre chemin, qu'il nous faut tous prendre.Prenant une inspiration, il posa le chiffon et rengaina doucement son épée dans son fourreau. Il regarda son ancien élève, épuisé d'avoir trop luté, et posa sa main sur son épaule en souriant.
- Le rideau de pluie grisâtre de ce monde s'ouvrira, et tout sera brillant comme l'argent. Alors tu les verras...- Quoi Tharivor ? voir quoi ?A présent Amnael le fixait ausssi, son regard triste croisant celui bienveillant de son ami, le remerciant silencieusement de la vague d'apaisement qu'il lui transmettait.
- Les rivages blancs... et au-delà, la lointaine contrée verdoyante, sous un fugace levé de soleil.Saisi par cette douce vision, Amnael sourit lui aussi, se préparant sereinement à ce qui suivrait. Apaisé, il prit une grande respiration et resserra la sangle de son fourreau, et posa la main sur le pommeau de son épée, de nouveau près à repartir se battre.
- Alors, ça ne va pas si mal- Non, en effet.Ils se relevèrent, s'aidant l'un l'autre. Ils s'enlacèrent puis, s'empoignant le bras à la manière des chevaliers, dégainèrent respectivement une épée bâtarde et un espadon, et repartirent dans la mêlée.
Reprenant pied avec la réalité, Amnael comprit où il était.
**Je suis mort ?**